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  • Photo du rédacteurGilles Cailleau

L'air du temps

J’aimerais en ce joli mois de juin vous faire partager une de mes dernières lectures. L’auteur n’en est pas vraiment un, mais tout le monde a le droit d’écrire, surtout quand c’est avec conviction.

Nouveau président de l’association Avignon festival et compagnie, qui gère de fait le Festival Off d’Avignon — Car pour le droit, il n’y en a pas dans cette aventure qui est née et a vécu jusqu’en 2003 dans une anarchie bienfaisante —, nouveau président, donc, de cette association, Pierre Beffeyte écrivait il y a quelques jours à propos de la politique de communication qu’il souhaite impulser :

[…] Le Off avait réussi à créer une marque. Maintenant, nous sommes davantage sur le marketing, nous déclinons les supports de communication de différentes manières en fonction des cibles pour dire […] que tout le monde peut y trouver ce qu’il veut. Nous redéployons la communication […] car, d’après nos sondages, nous avons eu une baisse des visiteurs touristiques à la journée. […] Nous avons une opération ciblée sur les 18-25 ans, un public qu’on touche peu […] Nous leur proposons un jeu sur les réseaux sociaux […] Nous avons créé un emploi de community manager […]* »

Autant vous prévenir, si j’ai, pour prendre soin de votre temps de lecteur, raccourci quelques passages,mes coupes, promis juré, n’en ont en aucun cas déformé les pensées de l’auteur. Elles ne sont ni dévoyées ni « sorties de leur contexte », pour reprendre une expression à la mode qui permet à n’importe qui s’apercevant qu’il vient de dire une énorme bêtise de rétropédaler avec élégance.

Alors, que pensez-vous de cette note d’intention à propos de notre cher festival ? Il me semble qu’avec un tel projet marketing, le off d’Avignon colle parfaitement avec son temps, c’est un festival de winner, la positive attitude dans toute sa splendeur. The perfect success-story. J’oserais dire un festival en marche.

Marque, marketing, cible, sondage, opération ciblée, community manager… Comme dirait le bon vieil Antoine Garamond – Jean Vilar nous regarde !

Au reste, je n’en veux pas à Pierre Beffeyte. Il ne fait pas dans l’hypocrisie et nous dit effectivement ce qu’est devenu ce festival, qui par ailleurs n’en est plus un si on lit la définition que le Off se donne de lui-même sur son site : « Lorsque nous évoquons aujourd’hui le festival OFF d’Avignon, il est question d’un salon du spectacle vivant sous toutes ses formes. » Le Off est donc un salon.

On le savait depuis longtemps, mais peu de gens osaient le dire, et seulement de ses détracteurs. Si maintenant ses membres les plus éminents le reconnaissent, on pourra aller y jouer en terrain connu.

J’espère qu’en y retournant (car j’y retournerai, c’est certain, je ne suis pas plus fort qu’un autre et je ne peux pas me passer de cet incontournable salon), je n’y entendrai plus les habituelles auto proclamations qui voudraient nous faire passer pour des rêveurs invétérés, à la recherche seulement d’air et d’art pur.

L’air du temps est tout sauf pur. Il est gagnant, il est optimiste, il est rajeuni, il est dégagiste, il est insoumis, il est société civile, il est en marche, il est en ordre, il est debout, il est primo-quelque chose ou machin-compatible… Ça fait beaucoup de particules fines au millimètre cube.

Gilles, le 15 juin.

*La lettre du spectacle, n° 406, 12 mai 2017, p. 6.

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